Rencontre avec Alexis Giraudeau, Régisseur Général AFR - Formateur & Créateur d'ECO Régie et d'Au Cul Du Camion
MC : Pourriez-vous commencer par vous présenter en quelques mots ?
AG : Je suis Alexis Giraudeau, régisseur général depuis 5 ans. Je travaille sur la fiction de manière générale, long métrage et série particulièrement. Je suis membre de l’AFR (Association Française des Régisseurs) et de son bureau, dont je suis le référent éco-tournage. Nous avons aussi lancé une initiative hors AFR, le collectif Eco-Régie, qui réunit les régisseurs pour mettre en commun les bonnes pratiques d’éco-responsabilité sur les tournages.
MC : D’où vous est venue cette idée ?
AG : En fait, ça part d’un constat que j’ai fait à la sortie de la série L’effondrement, sur laquelle j’avais travaillé pour Canal+. C’était un projet un peu pilote sur ces questions là, sur l’écologie mais aussi sur la parité des chefs de postes, l’équité salariale,… On voulait accorder le fond, le sujet de la série, avec les conditions de production. On a vraiment pu aller au bout des choses, et c’est suite à ça que j’ai fait une synthèse en espérant donner envie aux gens de partager leurs expériences aussi. Eco-Régie est donc née après ça, pour partager nos visions et problématiques.
MC : Vous pouvez nous en dire plus sur Eco-Régie ?
AG : Eco-Régie n’est pas une société comme A Better Prod,… C’est simplement des gens (environ 300 personnes) qui se réunissent sur Discord pour discuter de leurs expériences, faire de la veille sur l’actualité,… Ce que j’applique moi, ce n’est pas forcément ce que va appliquer mon voisin mais c’est une méthode avec ses limites. Le discord permet de rassembler tous les partis prenants de l’industrie (notamment les jeunes actifs) pour partager nos outils éco-responsables. Le but, c’est qu’il y ait aucun frein mais un changement d’habitude et de pratique. On participe aussi à des tables rondes et des formations. Nous restons des intermittents du spectacle qui devons faire nos preuves à chaque tournage, avec de multiples employeurs… Se remettre en question, c’est un peu devoir se jeter dans le vide. Nous avons donc besoin de donner des exemples pour accompagner cette transition. Les formations permettent d’apprendre des méthodes et des techniques mais aussi tout l’aspect psychologique dans la conduite du changement des technicien.nes.
MC : Et vous, comment vous êtes formé à cette transition éco-responsable ?
AG : Moi je me suis formé à l’école de la vie. Il n’y avait pas de formation, mais il est question de bon sens avant tout. Il y a des choses que l’on peut faire à l’échelle individuelle mais pas d’une équipe pour le moment. Avec L’effondrement, on m’a donné la possibilité d’expérimenter, de faire des choses. Avant, j’osais pas forcément me remettre en question mais je n’avais surtout pas le temps. On a une vraie problématique sur les temps de préparation de tournage. L’anticipation fait partie des clefs de réussite des pôles artistiques comme financiers, et joue sur la charge mentale de l’équipe. On ne peut mettre que des pansements sur le tournage, on ne peut pas éviter la blessure. On a besoin d’être accompagné dans cette transition. La finalité de tout ça, c’est de transformer l’imaginaire des gens, donc il faut que le message soit à la hauteur de ce qu’on va mettre en place.
MC : Vous avez l’impression que le secteur va de l’avant ?
AG : Oui, ça va de l’avant, notamment sur trois points. Le covid nous a fait faire un retour en arrière avec tout ce qui était jetable (masques,…). Mais le fait que EcoProd se soit structuré a fait accélérer les choses, puisque c’est devenu une association. L’urgence climatique est là, il faut aller vite et fort. Et troisièmement, le fait que le CNC mette en place des bilans carbone est un signal fort pour l’industrie. Les producteurs sont en train de comprendre qu’il vaut mieux appréhender les choses que de les subir. Depuis quelques mois, il se passe des choses. Il suffit de voir aux assises de l’éco production qui ont eu lieu en décembre, nous étions entre 300 et 350 personnes alors qu’il y a pas si longtemps il y n’y avait que des dizaines de personnes aux tables rondes. Cependant, on ne parle pas beaucoup de nature et il y a là aussi des choses à savoir (sur le bruit, les odeurs, les lumières,…). On va essayer de mettre en place des fiches pratiques et des vidéos pour expliquer comment tourner en milieu naturel, tout ça en concertation avec les régions et les commissions.
MC : Vous êtes vous même formateur, c’est ça ?
AG : Oui, nous avons une formation assez précise qui dure 3 semaines, en temps plein (35h). Elle aborde tout le prisme de l’écologie, avec pleins d’intervenants aux opinions différentes. On mène aussi un aspect pratique, où l’on va sur le terrain (ressourceries, studios,…) sans édulcorer les choses. La formation doit être en phase avec les réalités du métier, avec ses limites. On ne cherche pas à ce que ce soit tout noir ou tout blanc, mais on veut donner des outils afin de savoir s’adapter aux projets donnés. On leur donne des outils psychologiques, pour cerner qui est en face de soi et comprendre comment l’amener sur la voie du changement, plutôt qu’essayer de convaincre. Je ne veux surtout pas que l’écologie devienne une charge mentale supplémentaire, mais l’idée est de transformer nos pratiques. On manque de moments pour nous réunir, tous les acteurs de l’industrie, ensemble.
Interview réalisée par Margot Costa
Retrouvez Alexis Giraudeau :
SALLE ATELIER PRODUCTION FORUM
11h30-12h15
S’appuyer sur les territoires pour des productions éco-responsables
(par Production Forum)
Modération : Gwladys Bouillin-Pacheco, chargée de l’accompagnement des productions FPR
Intervenants :
- Samia Khitmane, responsable du pôle Partenariats-Mission cinéma-Ressources, Mairie de Saint Ouen
- Barbara Letellier, productrice, Haut et Court
- Alexis Giraudeau (AFR), régisseur général
PAVILLON TILLEULS
11h30-12h30
Eco-référent, administrateur de production, coordinateur d’intimité : des métiers d’avenir ?
(par la CST)
Modération : Baptiste Heynemann (délégué général CST)
Intervenants :
- Alexis Giraudeau (AFR), concepteur de la formation des eco-référents
- Etienne Labroue, réalisateur et éco-référent
- Sophie Timbal (AAPCA), administratrice de production
- Monia Ait El Hadj, coordinatrice d’intimité
- Ségolène Dupont, déléguée de la CPNEF
PAVILLON CYPRÈS
15h30-16h30
Les séries et la charge mentale
(par LA CST)
Modération : Sabine Chevrier
Intervenants :
- Alexis Giraudeau (AFR), régisseur général
- Didier Carton, délégué du CCHSCT
- Hervé Houssou, producteur, directeur de production
Autres articles
REPLAY PARIS IMAGES ONLINE 2022
Opening by Dominique Boutonnat, President of the CNCCase study “The Last Duel”...
Madeline Fontaine, directrice artistique costumes
Rencontre avec Madeline Fontaine costumière.Comment avez-vous abordé ce nouveau...
Jean Rabasse, chef décorateur « Notre-Dame brûle »
Rencontre avec Jean Rabasse chef décorateur.Les principaux défis sur le tournage...
Jean-Jacques Annaud, réalisateur « Notre-Dame brûle »
Rencontre avec le cinéaste Jean-Jacques Annaud.Pourquoi un film sur l’incendie...
Jean-Marie Dreujou, chef opérateur chez AFC
Rencontre avec Jean-Marie Dreujou, chef opérateur.Comment avez-vous abordé le...
Déborah Papiernik, SVP new business & strategic alliances chez Ubisoft
Rencontre avec Déborah Papiernik, d’Ubisoft qui est senior VP sur les...
Hervé Dupont, directeur des productions chez Fortiche Productions
Rencontre avec Hervé Dupont, directeur des productions chez Fortiche Production...
Antoine Cayrolco-fondateur et producteur chez Atlas V
Dans le cadre du Paris Images 2022, Antoine Cayrol, co-fondateur et producteur...
Anne Seibel, cheffe décoratrice
Dans le cadre du Paris Images 2022, Anne Seibel, cheffe décoratrice et...
John Bernard, producteur exécutif chez Peninsula Film
Dans le cadre du Paris Images 2022, John Bernard, producteur exécutif chez...